L’ EMEGENCE DES OUTILS NUMERIQUES DANS LE CONTEXTE D'URGENCE SANITAIRE ET LE RESPECT DE LA VIE PRIVEE
Partout dans le monde, dans le contexte actuel d‘urgence sanitaire, de confinement et de déconfinement, nous avons pu observer l’émergence d’outils numériques de suivi et de lutte contre la propagation du virus SRAS-COV-2.
Parmi ceux-ci , nous pouvons citer « Coronalert », « StopCovid » ou « Contact Covid ».
L’objectif principal ? Un meilleur suivi de l’évolution de la maladie.
Mais qu’en est-il du respect du droit à la vie privée ?
Des conditions strictes doivent être respectées.
Les enjeux éthiques des outils numériques liés à la traçabilité de la maladie
L’État d’urgence sanitaire est une disposition juridique exceptionnelle, qui doit permettre à un État de faire face à une épidémie, une pandémie ou une catastrophe sanitaire mettant en péril un pays.
Cette situation exceptionnelle permet à L’État de prendre des mesures telles que celles de limiter la libre circulation des individus ou de restreindre leurs droits et libertés fondamentaux.
Beaucoup d’États ont commencé à développer ce que nous appelons des outils de tracing, c’est-à-dire des applications qui permettent de connaître des informations personnelles de santé, qui les partagent et qui permettent de savoir en temps réel qui a été ou n’a pas été infecté par le virus, qui présente des symptômes, qui doit rester en quarantaine car il/elle a été exposé.e à un risque.
Il va de soi que le droit à la vie privée n’est pas du tout respecté dans cette situation
. « Les dispositifs numériques d’identification et de suivi des maladies et des malades varient en fonction de la finalité du traitement et peuvent inclure le traitement, en temps réel, des données personnelles et de santé telles que les déplacements, les croisements avec d’autres personnes, les symptômes, l’état de santé et le diagnostic positif de la maladie.
Pas suffisamment encadrés ou avec un encadrement inexistant, ils peuvent provoquer l’effet contraire à celui recherché : ils peuvent exacerber des problèmes comme la panique sociale, la discrimination et la stigmatisation des personnes concernées, ainsi que l’érosion de la confiance au Gouvernement et à la santé publique, et les inégalités »[1]
Face à des risques aussi grands, de nombreuses institutions comme le Groupe européen sur l’éthique dans les sciences et les nouvelles technologies, ont déterminé que cette limitation des libertés et des droits fondamentaux devait respecter 4 règles strictes :
- La nécessité
Les outils numériques de traçage permettent aux personnes d’être informées à l’avance et de prendre les mesures nécessaires telles que s’isoler en quarantaine ou se faire tester, ce qui permettra à celles-ci d’éviter la contamination d’autres personnes et de réduire la propagation du virus.
« Dans ce cadre, la restriction temporaire de certains droits et libertés peut être éthiquement justifiée, tel que souligné par le Contrôleur Européen de la Protection des Données (CEPD) dans sa déclaration du 6 avril 2020. »
- La proportionnalité
La collecte des données personnelles de santé doit être justifiée par un motif d’intérêt général et être régulée d’une manière proportionnée aux risques.
« les protections constitutionnelle et conventionnelle du droit au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel, assises notamment sur la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, imposent que les atteintes portées à ces droits par les autorités publiques soient non seulement justifiées par un motif d’intérêt général, comme cela est le cas en l’espère, mais soient également nécessaires et proportionnées à la réalisation de cet objectif »[2]
- L’efficacité
L’utilisation de tels outils doit faire l’objet d’une étude de leur efficacité, basée sur les chiffres et l’évolution de la situation sanitaire.
- La limitation dans le temps
Le caractère TEMPORAIRE est une condition sine qua non, pour éviter des abus futurs dans la gestion des données personnelles .
Ces 4 conditions : la nécessité, la proportionnalité, l’efficacité et la limitation dans le temps doivent être vérifiées régulièrement et l’utilisation de ces outils numériques doit faire l’objet d’une évaluation en fonction de l’évolution de l’état sanitaire et des rapports concernant ceux-ci.
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[1] L’ÉMERGENCE DES OUTILS NUMÉRIQUES DANS LE CONTEXTE D’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE. ENJEUX ET CONDITIONS D’APPLICATION FACE AU DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE, Alejandra Delfin Rossaro, Emmanuelle Rial-Sebbag,, « Droit, santé et société », 2020/1 N° 1, pages 98 à 104
[2] CNIL, Délibération n° 2020-056 du 25 mai 2020 portant avis sur un projet de décret relatif à l’application mobile dénommée « StopCovid » (demande d’avis 20008032), paragraphe 4 et 5.